Anthologie pour la liberté d’expression : « l’affaire Ali Aarrass » par Omer Vandar

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Anthologie pour la liberté d'expressionJ’espère que vous avez apprécié notre anthologie pour la liberté d’expression et la nouvelle que j’ai écrite malgré son style humoristique et quelque peu décalé, ce récit n’a rien de fictif.

Au 1er avril 2016, Ali Aarrass aura passé neuf années en prison en dehors de toute légalité: le juge Espagnol a prononcé un non lieu et réclamé sa libération, le CEDH s’est opposé à son extradition vers le Maroc qui a eu lieu malgré tout et un observateur de l’ONU a certifié qu’il a bel et bien été torturé. Sa condamnation se base exclusivement sur des aveux obtenus sous la torture *après* le non lieu prononcé en Espagne. Comme si tout ce procès n’était dès le départ qu’un vaste et sinistre farce.

La liberté de penser, de s’exprimer, de se déplacer, de communiquer en privé sans que nos propos ne soient transmis à un monarque ayant le pouvoir de nous faire condamner au moindre prétexte nous semblent tellement évidents aujourd’hui qu’on a presque oublié qu’il y a peu de temps encore, des hommes pouvaient être arrêtés et déportés pour le simple crime de déplaire au « prince » ou pire encore, d’appartenir à un peuple honni.

C’est ainsi qu’en 1894, le Capitaine Alfred Dreyfus fut accusé d’un crime par la justice de son pays pour la simple raison de son appartenance au peuple Juif, tout comme Ali Aarrass l’est aujourd’hui parce certains au sein du gouvernement belge ont décidé que les «binationaux belgo marocains» devaient perdre leurs droits les plus élémentaires. La condamnation de Dreyfus fut un crime due au racisme ordinaire, celle d’Ali Aarrass s’inscrit dans le cadre beaucoup plus inquiétant d’un racisme d’état qui ne recule devant aucune bassesse pour arriver à ses fins: nier ou minimiser les tortures dont il a été victime, lui refuser les droits conférés par sa nationalité et laisser encore planer un doute sur sa totale innocence qui a été constatée par le juge Garzon, un magistrat qui n’a justement pas la réputation d’être tendre ou négligent envers les criminels.

L’affaire Dreyfus a finalement été résolue, non grâce à l’intervention de la justice ou par une miraculeuse prise de conscience par les élites, aveuglées par l’antisémitisme «bien pensant» qui était la norme, mais par l’acharnement de quelques personnes courageuses qui ont usé et abusé de leur liberté d’expression, cette liberté même qui est aujourd’hui menacé, tant en France par des projets de «blocages de site internet» (avec redirection des visiteurs vers une page du ministère de l’intérieur ou leur adresse IP sera pieusement conservée) qu’en Belgique ou ceux qui osent critiquer certains ministres belges sur facebook sont ausitôt convoqués par la police en dehors de tout contrôle judiciaire.
Emile Zola a lui aussi eu des ennuis, lorsque sa voix s’est élevée pour dénoncer les crimes dont Dreyfus était victime, et non coupable, mais même à cette époque ou n’existaient ni l’ONU, ni le Conseil Européen des droits de l’homme n’étaient là pour tempérer les injustices, le gouvernement n’a osé faire taire Emile Zola sans passer par une justice qui n’était pas totalement sous leur contrôle. Or les lois qui sont votées actuellement vont toutes dans le même sens pour permettre aux chefs d’état, tant en France qu’en Belgique, de se passer du juge d’instruction pour faire taire les voix discordantes.

Si la liberté d’expression doit être préservée, ce n’est pas pour conserver le droit inaliénable des guignols de l’info à se moquer de Nicolas Sarkozy, de Charlie Hebdo à publier des caricatures islamophobes plus ou moins obscènes ou des internautes belges de dire « prout à Charles Michel » sur leur page facebook. Elle doit être préservée, à n’importe quel prix, parce que dans une société dont les dirigeants n’ont plus de contre-pouvoir, elle est l’unique recours pour ceux qui estiment que leur gouvernement n’a pas le droit de les traiter comme des serfs, susceptibles d’être privés de leurs droits les plus élémentaires et torturés pour le bon plaisir du « prince », Car Ali Aarrass a bel et bien été torturé, et il l’a été grâce à la complicité active du gouvernement belge, et ce seul fait constitue un crime contre l’humanité, même si Ali était coupable… Or il a été prouvé qu’il ne l’ést pas.

En France comme en Belgique, la lutte pour la liberté d’expression n’a rien d’un luxe de « bobo nanti ». C’est pour tous ceux qui sont visés par les « lois raciales » qui repointent le bout de leur nez d’une manière de moinsen moins discrète une simple question de vie ou de mort.

Merci d’avoir soutenu notre Anthologie.

Merci de continuer à lutter, pour la liberté d’expression, et pour toutes les luttes qui ont besoin d’elle.

OMER VANDAR

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