VIDEO Emission « Indices » sur RTL TVI (23 février 2011) : « Un Belge torturé à mort au Maroc ? »
Le Soir, 17 février 2006 :
L’ex-journaliste Claude Moniquet s’est recyclé en « expert du terrorisme ». Il a gagné son procès contre un journal marocain. (Le Soir, 17 février 2006)
On l’aime ou on ne l’aime pas. Poser la question « qui est Claude Moniquet ? » aboutit à dresser un portrait en noir en blanc. « Un mercenaire », dit cette source proche de la sûreté de l’Etat qui en fait « la voix de son maître de la DST française » (Direction de la surveillance du territoire). « Un manipulateur », entend-on dire dans certains cénacles politiques. « Un type qui se vend au plus offrant », conclut ce journaliste, qui lui prête néanmoins « un bon bouquin, et le mérite d’avoir parlé avant tout le monde d’Echelon et des étudiants chinois qui espionnaient à l’UCL ».
« Un analyste, qui peut être bon parfois, mais souffre du fait que l’intelligentsia belge est souvent de gauche, alors qu’il est franchement à droite », dit cet autre confrère. Dans un bistrot du centre de Bruxelles, Claude Moniquet écoute les critiques, un énorme « boulon » vissé aux lèvres. Chauve et fort, le regard perçant, la voix monocorde et caressante, il a le parfait physique du barbouze.
Au cours des deux dernières décennies, le Français et ancien journaliste Claude Moniquet a donné cours à bien des rumeurs. Il a été respectivement qualifié de proche des Cellules communistes combattantes (CCC), d’agent ou de proche du Mossad (les services secrets israéliens), et en France de la DST ou de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure). Moniquet balaie d’un geste la table et sa « mauvaise réputation » : « Le Mossad, c’est sans doute parce que je suis juif. Et mes écrits montrent que je suis plutôt pro-israélien ; la DST, c’est absurde. C’est un service de police, et je ne suis pas policier. » La DGSE ? « Non. Et de toute façon, vous ne passez pas 25 ans de votre vie à travailler sur le renseignement et le terrorisme sans traîner ce genre de réputation. »
Au lendemain du 11 Septembre, Claude Moniquet a fondé l’Esisc (European Strategy intelligence and Security Center) avec deux partenaires. Sur internet, son site en impose. Hormis la capacité affirmée d’analyser le renseignement et la prévention de la menace terroriste, tout y est mis en oeuvre pour donner de l’Esisc l’image d’un centre de recherches solide et reconnu. Et ça marche : « Jamais je n’aurais cru qu’un centre de Bruxelles puisse produire quelque chose d’aussi partisan que ce rapport sur le Polisario », s’étonne ainsi Khadija Mohsen-Finan, chercheuse à l’Institut français des relations internationales (Ifri) sis à Paris. Preuve que l’Esisc « en jette ». « Mais Moniquet est tout seul. Ce centre, c’est lui », affirme un homme politique belge qui s’est penché de près sur le rapport Polisario et conclut lui aussi à « un travail partisan ».
Claude Moniquet rétorque en dénombrant « onze personnes travaillant pour l’Esisc, pour la plupart des free-lances, en Belgique et à l’étranger ». Sur sa carte de visite, son seul numéro de GSM. Pas d’adresse. Mais qui l’en blâmera à l’heure du télétravail ?
Que vaut, sur le plan scientifique, la production de l’Esisc ? Ici aussi, tout et son contraire. Notre source proche de la sûreté la qualifie de « tout venant, ni bonne ni mauvaise, mais pas assez pointue pour être vraiment proche des principaux acteurs du renseignement ». Moniquet renvoie la balle en rappelant que CNN ou le Congrès américain lui ont parfois demandé son expertise. Alors…
Ce n’est pas sur le terrain scientifique que Moniquet a cherché à demander des comptes au Journal hebdomadaire. « Tout travail peut-être discuté. Je ne suis pas tenu à l’objectivité journalistique », admet-il en réfutant avoir voulu démontrer que « le Polisario est proche d’Al-Qaïda ».
En revanche, à entendre Moniquet, la faute du Journal hebdomadaire a été d’insinuer que le travail sur le Polisario fut « vraisemblablement financé » par Rabat. L’ancien journaliste du Quotidien de Paris et de Ciné Revue est intraitable : il y a eu diffamation. « Jamais le journal n’a cherché de surcroît à me contacter. » La publication d’un droit de réponse n’a pas abouti, les deux parties s’en rejetant la responsabilité. Le « préjudice » subi a été estimé par Claude Moniquet et son avocat à 500.000 euros (il a obtenu 270.000 euros, NDLR), là où le franc symbolique aurait pu suffire.
« Je suis comptable de la vie de mon entreprise et du bien-être des gens qui y travaillent », lance le directeur (porte-parole et analyste) de l’Esisc. Qui dit rester « froid » face à la perspective d’asphyxier économiquement un des rares journaux indépendants marocains. Quant à passer pour le bras armé de Rabat, si « le Journal hebdomadaire avait observé les règles journalistiques, on n’en serait pas là ». Claude Moniquet avait affiché la volonté d’offrir « la moitié de cette somme aux victimes du Polisario ». La chose n’a plus été évoquée cette fois.
1958 Naissance à Bruxelles, le 3 mars. Citoyen français.
1997 Moniquet est journaliste. Moniquet est journaliste et travaille sur les affaires qui secouent notre pays. Publie « Les dossiers noirs de la Belgique » puis « Les affaires Dutroux et Derochette ».
2000 Condamnation en appel du magazine « Ciné-Télé-Revue » pour atteinte à la vie privée de la juge d’instruction Martine Doutrèwe. En cause : le travail de Moniquet.
2002 Crée à Bruxelles le Centre européen pour le renseignement stratégique et la sécurité (Esisc). Réussit à imposer un profil d’« expert en terrorisme », souvent contesté.