(photos : action pour Ali Aarrass à l’occasion de la journée mondiale pour les droits de l’homme 10 décembre 2014)
De ma cellule où je suis seul.
C’est de ma cellule que je m’adresse à vous tous.
A toutes celles et ceux qui participeront au rassemblement ce 10 décembre à l’occasion de la journée internationale des droits de l’homme.
A vous qui n’avez pas perdu ni espoir ni confiance et qui poursuivez en luttant par tous les temps.
A vous tous qui y croyez et criez d’une même voix, unis et fermes dans votre position de contestataires contre toutes les formes d’injustices. Soucieux que la vérité surgisse et que les discriminations prennent fin.
A partir de ma cellule où je suis maintenu en isolement je vous dis, que même si mon corps est enfermé, je suis avec vous. Mon cœur, mon esprit, mes pensées sont avec vous.
Vous êtes avec moi et je suis avec vous. Les multiples tentatives visant à m’arracher ma dignité d’homme honnête et à détruire mon humanité et ma personnalité ont échouées et je vous garantis que c’est en grande partie votre force à vous tous qui est devenu mienne et qui m’ont permis de gagner en courage et détermination. Jusqu’à ce jour et malgré toutes les souffrances vécues, je n’ai cédé et ne céderai jamais à aucune de leurs habituelles formes d’intimidations.
J’ignore totalement ce qu’il adviendra de moi, chaque jour qui passe est un jour que je décompte en me demandant ce que le lendemain me réserve comme surprise, mais je ne désespère pas car je ne suis pas seul. Je reçois des mots par centaines qui me le prouvent. Des courriers qui viennent des quatre coins de la Terre.
Leurs ruses n’auront pas réussi à nous faire abandonner ni moi, ni mes proches, ni vous mes amis. Au contraire. Ils n’ont réussi qu’à nous rendre plus forts et à tous nous unir.
Cela fait déjà six ans et 8 mois qu’on me prive arbitrairement de ma liberté et qu’on m’a ainsi éloigné injustement de ma très chère famille, mes parents, mon épouse, ma fille qui en souffrent, j’en suis sur, plus que moi-même.
Mais voilà, il se fait que je corresponds à un gabarit. Au modèle tant recherché par ceux qui tendent à alimenter la peur du terrorisme. Moi et d’autres comme moi avons été les parfaits boucs émissaires utilisés pour servir d’exemple. Nous avons été choisis pour rendre réel des mensonges. Pour donner vie et existence à une terreur qui doit absolument planer et que les gens qui n’ont pas compris et qui ont peur, se réjouissent de les voir se faire arrêter.
Pourtant je suis innocent et m’épuise à le répéter depuis des années. Mais je m’appelle Ali Aarrass et ce nom est à mon avis la clé de tous les mystères.
Au Maroc pour parvenir à une condamnation, à défaut de culpabilité on m’a torturé et ainsi bafoué toutes les conventions des droits de l’homme.
La dénonciation de ces actes barbares moyenâgeux m’a valu d’autres formes de mauvais traitements de manière récurrente.
J’ai pu, Dieu merci, endurer en résistant à toutes les brutalités et continuerai à le faire.
Contrairement à mes bourreaux, je resterai digne et ne courberai pas l’échine, ni ne succomberai point à la corruption.
A ce stade ci, les mots viennent à me manquer pour vous témoigner toute ma gratitude. Votre soutien est l’une des choses les plus réconfortantes qui ait pu me parvenir dans ces lieux froids, humides, sales et où l’abus de pouvoir sous forme d’humiliations, intimidations, menaces, insultes …. Est omniprésent.
Très chers amis, pour conclure cette lettre, je vous dis ceci :
« Chacun de nous a conscience de sa force et de ses capacités personnelles, qu’elles soient d’ordre moral ou matériel. De sa volonté. C’est à force de volonté que les intentions se concrétisent et que pas mal de choses totalement inattendues se réalisent.
La mobilisation par différents moyens permet à ceux qui n’ont pas compris de s’intéresser et qui sait peut être qu’un jour ils comprendront.
J’ai espoir qu’un jour nous soyons tous égaux devant la loi, tous égaux devant les droits de l’homme. C’est grâce à l’existence de gens comme vous que j’y crois et vous en remercie du fond de mon cœur ».